Sarajevo Quartiers oubliés

Sarajevo offre des contrastes saisissants et l'on peut s'éloigner des quartiers touristiques du centre ville pour découvrir Sarajevo sous d'autres angles. Par exemple, prendre le car vers l'ouest de la ville et s'arrêter au niveau du village olympique. Il y a là un très grand cimetière muliconfessionnel juif, musulman et chrétien. Des points de vue s'offrent sur l'ensemble de la ville et sur les collines alentour dont le Mont Igman tristement connu pour les tirs d'artillerie serbe meurtriers sur Sarajevo qui y ont été déclenchés. 

 Pourquoi visiter un cimetière? Je pense à la guerre de Bosnie (93-95), en particulier à Sarajevo entre les différentes factions, bosniaques, serbes et croates. Ce cimetière est pour moi un symbole. Il faudrait mieux que les hommes et femmes des différentes confessions se réunissent de leur vivant plutôt que dans la mort, c'est la réflexion qui s'impose à moi dans ce lieu si particulier.

Je quitte ce lieu et rejoins le centre ville. Je décide d'explorer l'autre versant de la vallée de la Miljaka et m'engage dans les quartiers "résidentiels" de Sarajévo: Bistrik puis Hrid. Je suis surpris car ça  grimpe beaucoup, Très vite je surplombe à nouveau Sarajevo, sur l'autre versant(est). 

Je franchis l'avenue Mladih Muslimana, la rocade qui contourne Sarajevo sur le versant est et je continue l'ascension sans me douter que je me dirige vers la "frontière" de la république Srepska, c'est à dire la république serbe de Bosnie. J'observe les installations désormais obsolètes construites à flanc de colline pour les J.O. de Sarajevo ( le téléphérique qui part de Bistrik vers le Mont Igman ne fonctionne plus depuis la guerre de Bosnie).  Des maisons sans charme mais spacieuses, jalonnent ces rues calmes, qui forment un véritable dédale où j'engage sans réfléchir. Il est 17 heures, et bientôt les prières des muezzins de toutes les mosquées de Sarajevo vont retentir et libérer leurs lancinantes complaintes.

Les flancs du Mont Igman se rapprochent mais la montée deviend très difficile. Jai chaud et soif et des nuages noirs s'accumulent sur la ville.  Je décide de rebrousser chemin et redescend rapidement vers le centre ville. La pluie ne tarde pas à tomber et je dois m'abriter plusieurs minutes sous les auvents des échoppes du marché de Barcasija avant de rentrer exténué à l'hôtel. 

 Le lendemain, je m'aventure à nouveau sur ces quartiers escarpés du "versant est" et me retrouve rapidement en pleine nature à la lisière de la ville, très probablement en république serbe de Bosnie. Je dois demander mon chemin;  L'homme qui me renseigne m'indique un chemin forestier qui redescend vers la ville. J'emprunte le sentier avec précaution car les contreforts du Mont Igman ont été copieusement minés pendant la guerre civile. 

Je n'ai pas loué de voiture durant mon séjour et je le regrette un peu. Mais dans ce cas, me serais-je jamais aventuré dans ces quartiers oubliés? Aucun monument, aucune architecture significative, seuls quelques parcs peu entretenus apparaissent ça et là et ne valent pas, me semble-t-il, le détour. Pourtant, il règne un calme serein dans ces quartiers, dont les maisons ressemblent souvent à des gros chalets savoyards. L'extérieur est peu soigné, le crépis absent laisse apparaître les parpaings ou les briques creuses mais on devine aux paraboles et à d'autres signes qu'elles possèdent tout le confort de nos résidences. Les points de vue sur la ville y sont nombreux et permettent de mieux comprendre la topographie des lieux: Sarajevo s'allonge dans une direction est-ouest le long de la Miljacka dans une vallée fermée au nord et sur ces deux versants par de hautes collines atteignant jusqu'à 1000 mètres. La Bosnie est montagneuse sur les deux-tiers de son territoire et les hivers y sont rudes. Je comprends mieux ainsi l'aspect de ces maisons aux formes "savoyardes".